Matière à réflexion – Les ménages québécois face à l’inflation : un état des lieux

Attentif aux sujets qui pourraient interpeller les parlementaires dans leur travail, le Service de la recherche de la Bibliothèque de l’Assemblée nationale propose des notes d’information sur des thèmes d’actualité et des enjeux émergents. C’est le cas de la série Matière à réflexion, qui rassemble l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur certaines questions d’intérêt public.

Le Québec, à l’instar du reste de la planète, est présentement confronté à une forte inflation. Elle est notamment causée par la perturbation des chaînes d’approvisionnement et la pandémie de la COVID-19. Les données les plus récentes, soit celles d’août 2022, indiquent que le taux d’inflation a atteint 7,1 % sur un an au Québec. La hausse généralisée des prix a évidemment d’importantes répercussions sur les ménages québécois, en particulier ceux dont les revenus sont les plus faibles. Des ménages doivent réduire leurs dépenses alors que d’autres sont contraints de se tourner vers les banques alimentaires pour subvenir à leurs besoins. 

Première lecture propose ici une nouvelle fiche d’information Matière à réflexion qui brosse un portrait de la question de l’inflation au Québec et de ses répercussions. Cette fiche d’information est également accessible sur le site web de la Bibliothèque de l’Assemblée nationale, comme d’autres notes produites par le Service de la recherche. 

Mah Aristide Dion
Service de la recherche

En quelques mots

  • La Banque du Canada définit l’inflation comme l’augmentation soutenue et durable des prix des biens et services. Elle est généralement mesurée sur la base de la variation de l’indice des prix à la consommation (IPC) qui indique la variation du prix d’un panier fixe de biens et de services consommés par les ménages au cours d’une période.
  • Selon le document L’inflation expliquée de la Banque du Canada, un niveau d’inflation bas et stable favorise la croissance économique. Cela permet aussi de mieux prévoir les évolutions des revenus et des prix, d’ajuster les politiques de développement économique et de créer un marché du travail vigoureux. À l’inverse, une augmentation brusque et rapide du taux d’inflation peut être problématique. Dans de telles situations, le pouvoir d’achat réel des ménages est déprécié lorsque les revenus ne suivent pas le rythme de l’inflation.
  • Dans l’objectif de favoriser le bien-être économique de la population et d’assurer une certaine prévisibilité de l’évolution de l’économie, la Banque du Canada et le gouvernement fédéral s’accordent sur une cible de maîtrise de l’inflation pour une période de cinq ans. Dans l’entente sur le Renouvellement du cadre de politique monétaire de décembre 2021, cette cible a été fixée à 2 %, soit à l’intérieur d’un intervalle allant de 1 % à 3 %. Ils reconduisent ainsi la cible convenue lors de l’entente de 1991.
  • Au Québec, le taux d’inflation sur un an a dépassé le seuil de 3 % pour la première fois en avril 2021. Il a ensuite continué à augmenter au cours des mois suivants pour finalement atteindre 8 % sur un an en juin 2022. Un ralentissement de l’inflation est toutefois observable depuis ce sommet. Les données pour le mois d’août 2022 font état d’un taux de 7,1 %. La hausse des prix du panier de consommation demeure donc largement supérieure à la cible de 2 % convenue entre la Banque du Canada et le gouvernement fédéral.
  • L’inflation au Québec touche actuellement l’essentiel des produits et groupes de produits constituant le panier de consommation de référence. Toutefois, les prix de certains biens et services essentiels ont particulièrement augmenté. Par exemple, l’indice des prix des fruits et légumes frais a connu une augmentation de 9,4 % sur un an tandis que celui de l’essence a augmenté de 31,5 % en août 2022, comparativement au même mois en 2021. Les prix reliés au logement ont quant à eux augmenté 5,8 % sur un an (Institut de la statistique du Québec : 2022).
  • Une enquête de Statistique Canada rapporte que, pour près de trois ménages sur quatre, la hausse des prix a influé sur leur capacité à assumer leurs dépenses. Cette proportion atteignait 85 % chez les ménages ayant les revenus les plus faibles. La Banque Royale du Canada (RBC) indique elle aussi que la montée des prix détériore particulièrement la situation financière des ménages aux revenus faibles et moyens. Cette situation peut s’expliquer de deux façons. Premièrement, ces ménages doivent consacrer une part plus importante de leurs revenus aux achats de consommation, en particulier pour les biens et services essentiels. Par exemple, en 2019, les 40 % des ménages ayant les revenus les plus faibles ont dépensé de 15,3 % à 17 % de leur budget pour l’alimentation. Ce pourcentage était de 12,6 % chez le 20 % des ménages ayant les plus hauts revenus (Harvey et Nguyen : 2020). Deuxièmement, les ménages à plus faible revenu ne disposent pas d’épargnes nécessaires pour faire face à l’inflation sur le long terme (Desjardins : 2022).
  • Dans le contexte actuel, certains ménages doivent adopter des stratégies de substitution des biens et services consommés. D’autres sont contraints de réduire ou de supprimer certains postes de dépenses. De plus en plus de ménages se tournent d’ailleurs vers les organismes communautaires pour leurs besoins en alimentation. Le réseau des Banques alimentaires du Québec rapporte que les demandes d’aide alimentaire ont augmenté de 50 % par rapport à l’année 2019, notamment en raison de la pandémie et de l’inflation.
  • L’inflation augmente aussi indirectement le montant que doivent consacrer certains ménages au remboursement de leurs dettes. En effet, les hausses récentes du taux directeur pour contrer l’augmentation des prix engendrent une augmentation significative du service de la dette pour de nombreux ménages. Le 7 septembre dernier, la Banque du Canada a haussé son taux directeur à 3,25 %. Il s’agissait de la cinquième hausse consécutive du taux directeur.
  • Selon Statistique Canada et le gouverneur de la Banque du Canada, l’inflation en cours est la conséquence de la perturbation des chaînes d’approvisionnement causée par la crise sanitaire de la COVID-19. Elle résulte également de la baisse de la production des entreprises face à une forte demande en biens et services. À cela s’ajoute l’envolée des prix de l’énergie (produits pétroliers, électricité, mazout et gaz, notamment), accentuée par la guerre en Ukraine.
7,1 %
Variation annuelle de l’indice des prix à la consommation en août 2022 selon l’Institut de la statistique du Québec.
22,2 %
Variation annuelle de l’indice des prix à la consommation de l’énergie en août 2022, comparativement à août 2021 selon l’Institut de la statistique du Québec.
44 765 $
Coût annuel minimum d’un panier de consommation de base pour une famille de Montréal composée de deux adultes et de deux enfants en 2019 indexé à 2022 selon le rapport Le revenu viable 2022 en période de crises multiples de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques.

98 390 $
Revenu médian après impôt pour une famille de Montréal composée de deux adultes et de deux enfants en 2019 selon l’Institut de la statistique du Québec.

Initiatives québécoises

  • Dans le Plan budgétaire 2022-2023, le gouvernement du Québec a accordé une aide ponctuelle de 500 $ à 6,4 millions de personnes ayant un revenu inférieur ou égal à 100 000 $. Ces montants ont été versés en complément aux remboursements des crédits d’impôt.
  • Dans le cadre de la mise à jour économique et financière de l’automne 2021, le gouvernement du Québec a également fourni une aide plus ciblée à certains ménages. Les sommes versées aux ménages admissibles représentaient un montant de 400 $ pour les couples et de 275 $ pour les personnes vivant seules. Cette mesure a touché 3,3 millions de personnes pour un coût total de 740 millions de dollars. Par ailleurs, le gouvernement a prévu un montant totalisant 688,8 millions de dollars afin d’aider les aînés de 70 ans et plus à faibles revenus à faire face à la hausse du coût de la vie pour la période 2021-2026. À cet effet, le montant maximal de l’aide accordée aux personnes admissibles est bonifié pour ainsi atteindre 400 $ plutôt que 209 $.
  • En juin 2022, un montant de 3 millions de dollars a été octroyé au réseau des Banques alimentaires du Québec afin de les aider à répondre au nombre croissant de demandes d’aide alimentaire.

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